Sur le vif

C’est à la mort d’Alexandre Grothendieck que j’ai découvert son existence, comme beaucoup d’entre nous, les profanes. Un titre du journal Le Monde annonçant “la mort du plus grand mathématicien du 20ème siècle” avait attiré mon attention ainsi que provoqué ma méfiance : l’affirmation péremptoire de cette suprématie supposée et la formulation du titre, d’un spectaculaire très journalistique, m’a donc poussée à lire l’article. J’ai alors découvert le bonhomme, son histoire et celle de ses parents, sa personnalité complexe, révoltée, si singulière, son génie venu de nulle-part (cf. Michel Demazure dans Médiapart), son engagement politique, sa liberté, sa solitude, sa folie douce et lucide et surtout son texte Récoltes et Semailles dont j’ai entamé la lecture le jour même. Le désir de partager sur scène la beauté de ce texte est venu très vite. Les mots de Grothendieck, comme murmurés dans le creux de l’oreille, ont suscité des visions et provoqué en moi des émotions qui ressemblaient à d’autres nées d’autres lectures et notamment L’Autre Côté de Alfred Kubin, Flatland de Edwin Abott Abott ou le Mont Analogue de René Daumal. En utilisant des techniques propres à notre compagnie et reprenant des principes optiques et scénographiques qui permettent de perturber, modifier, transformer, déstabiliser, élargir le point de vue du spectateur – telles que la Caméra Lucida, la catoptrique ou le Miroir liquide (grand film de savon auto-alimenté et manipulable), ainsi qu’un dispositif scénographique circulaire et en rotation, nous voulons partager et faire entendre les mots d’Alexandre Grothendieck et différents aspects de sa pensée, “la mystérieuse beauté” de cette langue mathématique, inouïe au sens littéral, mais aussi ses réflexions sur l’enfance, l’innocence, le désir, la trahison, la solitude, l’amitié, l’amour.

Distribution

Anne Bitran, Florence Boutet, et les violoncellistes Eric Maria Couturier ou Raphaél Ginzburg (en alternance)