En mars 2020, la « Mobilisation et Coopération Arts et Culture » (MCAC) a été lancée par une quarantaine d’organisations du champ des arts et de la culture pour accompagner le secteur culturel, notamment de l’Économie sociale et solidaire (ESS), dans sa gestion de la crise COVID.
Espace d’interconnaissance, de partage d’information, d’accompagnement et de ressources, de prises de positions, de plaidoyer et de préconisations politiques, la MCAC, entretenue par cette quarantaine de réseaux, fédérations et organisations professionnelles, et coordonnée par l’UFISC, a joué un rôle certain dans cette période, notamment en termes d’orientation des politiques publiques.
Aujourd’hui , le secteur culturel est à nouveau confronté à une double crise majeure, d’une part austéritaire et d’autre part réactionnaire, qui impacte plus largement l’ensemble du champ associatif et de l’ESS : la solidarité internationale, l’éducation populaire, le social, la santé, le sport, les droits des femmes, l’insertion par l’activité, l’environnement et bien d’autres champs encore… Pour autant, elle est cette fois la conséquence de choix budgétaires et politiques et non pas de l’irruption. soudaine et subie d’un virus. Ces choix peuvent et doivent être discutés, mis en débat, combattus, transformés. Ils nous exhortent à anticiper les capacités d’actions collectives et transsectorielles à court, moyen et long terme.
En effet, partout, les coupes budgétaires se multiplient et ébranlent le tissu artistique et culturel de proximité et ses milliers d’initiatives privées citoyennes sur les territoires. La programmation financière faite par le gouvernement pour 2025 taille largement dans le budget du ministère de la Culture. L’action culturelle et l’éducation artistique et culturelle, garantes de la participation de toutes et tous à la vie culturelle, sont les premières touchées. L’année 2026 s’annonce encore plus catastrophique, Bercy contraint à considérer 2025 comme un plafond et à diminuer tous les budgets ministériels (voir à ce sujet la circulaire du 3 avril 2025 du ministère de l’Économie ). Le tissu artistique et culturel de proximité sera sacrifié sur l’autel de la dette, au côté de l’ensemble du champ associatif et de l’ESS.
Sur les territoires, les perspectives budgétaires, qu’elles soient la conséquence de choix politiques déterminés ou de baisses de dotations subies, sont tout aussi désastreuses. La coupe monstrueuse et idéologique contre les structures associatives d’intérêt général exploitées par la région Pays-de-la-Loire est l’arbre qui cache la forêt. Une grande majorité de régions affiche une culture budgétaire en baisse. Par dizaines, des départements font état de diminutions plus ou moins drastiques de leurs crédits culturels, à l’instar de nombreuses villes et intercommunalités.
Par effet domino, les structures les plus fragiles sont les plus touchées. La situation constitue un véritable plan social à bas bruit, qui amenuise la capacité de mise en œuvre des droits culturels des personnes. Les coupes, tout aussi violentes dans bien d’autres domaines, sont couplées à des menaces croissantes contre la démocratie et les droits humains fondamentaux. Les atteintes aux libertés associatives et de création , pourtant essentielles, se multiplient. Alors que les repères sont bouleversés et que les défis existentiels obligent à revoir nos modes de vie, notamment face aux bouleversements climatiques, les initiatives citoyennes, forces de transformation et de pouvoir d’agir, sont fortement précarisées.
Et cela dans un contexte global de puissance montée des idées de l’extrême droite. Où les volontés réactionnaires, porteuses du conservatisme, de l’autoritarisme et de la pensée de l’inégalité qui les constituant, dévoilent leurs attaques contre les services publics et le champ de l’intérêt général en France, en Europe ou à l’international. Où le capitalisme de plus en plus financiarisé et malade d’une course aux profits et à la croissance sans limite, poursuit sa volonté de faire du champ associatif un simple attribut du marché.
Nous l’affirmons : ce champ de l’intérêt général est crucial pour défendre l’exercice des droits humains et contribuer au lien social .
Face à cet état de fait, il nous faut réagir et porter haut et fort la défense de la diversité artistique et culturelle et des droits humains fondamentaux, notamment culturels, et le renforcement du service public et du champ de l’intérêt général comme un commun à coconstruire, porteur de libertés, d’égalité, de fraternité et de sororité. Nous devons réaffirmer que c’est la multitude des forces citoyennes, ancrées dans tous les territoires, que nous représentons ou défendons (dont plus de 340 000 associations culturelles, aux côtés d’innombrables autres initiatives d’utilité sociale) qui permet d’agir et de prendre soin des relations, de créer des espaces de culture, de débat et de solidarités, de soutenir les luttes contre les restrictions de libertés et pour la défense des droits fondamentaux, de consolider la démocratie en actes. Plus que jamais, il nous faut renforcer les coopérations, construire des solidarités et mener la bataille culturelle.
C’est ce que nous souhaitons porter à travers la « Mobilisation et Coopération Arts et Culture » relancée en avril dernier. Nous sommes déjà près de 50 organisations collectives se reconnaissant dans ces valeurs et partageant ce désir d’agir, nourries de toutes les forces citoyennes qui les constituant : équipes artistiques, lieux associatifs, lieux intermédiaires, structures d’accompagnement, espaces de pratiques et écoles, radios, médias, festivals, collectifs…
Nous invitons celles et ceux qui se reconnaîtront dans cette initiative à rejoindre la mobilisation et participer à nos actions.
Nous nous engageons à :
- Nous mobiliser pour d’autres politiques et arbitrages budgétaires et une ambition pour la diversité et la solidarité ;
- Coproduire de l’analyse partagée à partir des remontées et observations de terrain et du travail prospectif afin d’en tirer des enseignements pour des propositions à court et long terme ;
- Activer des actions de solidarités, d’appui et d’accompagnement par nos réseaux ;
- Participer aux mobilisations sectorielles et intersectorielles, invitant à une convergence des luttes pour la défense des droits fondamentaux.
D’autres choix sont possibles, d’autres voies restent ouvertes, un autre avenir est à portée de mains ! |